Chers amis,
Nous avons le regret de vous annoncer qu'en vue de l'effondrement à venir de la civilisation humaine (prévu en 2050 par des scientifiques, mais en réalité dès à présent dans le monde dévasté d'Al Teatro dont le dernier tome paraîtra très bientôt), il ne vous reste que peu de temps pour lire nos livres. C'est, en soi, un problème. Fort heureusement, à l'ère de la post-vérité (oui, vous avez bien lu, nous allons vous faire le coup de la post-vérité), nous pouvons aisément détourner les choses pour qu'elles nous apparaissent sous un meilleur angle. Le nôtre. Celui qui nous arrangera le plus. N'est-ce pas déjà ce que fait tout un chacun de nos jours ? Par exemple, si on en croit cet article des Échos, Amazon n'est pas une entité hypermondialisée qui vise à un statut de monopole sur le marché de la vente de livres (entre autres millions de produits allant de l'aspirateur au xylophone) quitte à asphyxier les petits commerces, mais un acteur qui permet aux libraires de "[jouer] désormais à fond leurs atouts : la proximité, le conseil, les rencontres avec les auteurs pour fidéliser les clients". En gros, il leur rend service. Et puis comme on le dit communément dans le monde merveilleux des marchés : "la concurrence est saine", donc tout va bien. Fort heureusement, on peut encore se servir des réseaux sociaux pour signaler ce genre d'étranges interprétations de la réalité. Mais ces réseaux sont-ils encore sociaux ? Dans cette jungle gangrénée par la haine et le personal branding, est-il encore possible de se ménager un espace numérique à soi ? Avec Olivier Le Deuff, nous avons tendance à penser que oui. Car une riposte est possible, et ces territoires sont à reconquérir. Le livre Riposte digitale : pour des maîtres d'armes des réseaux, désormais disponible, vous y aidera, et de préférence avant l'extinction totale des serveurs qui les alimentent. Quant à l'encombrement des tables des libraires par des torrents de livres que personne n'achète et encore moins ne lit, ce serait le signe d'une belle santé de l'édition en France et non, comme l'écrit par exemple Jacques Ancet dans son livre, Amnésie du présent, d'une "prolifération cancéreuse d'un genre [le roman] devenu la littérature par antonomase". Dans ce livre essentiel sur les états de la littérature aujourd'hui, qui paraîtra le 9 octobre, Jacques Ancet s'attache à explorer la poésie sous toutes ses formes, non comme un genre puisqu'elle serait "l'entre des genres. Un espace vide où tous viennent, en même temps, se nourrir et s'abolir".
Fort heureusement, de la poésie, il en existe encore à notre époque : rendez-vous par exemple ce samedi à la Maison de la poésie pour écouter Katia Bouchoueva et Laure Gauthier (soirée présentée par Séverine Daucourt). Des romans également et, dès dimanche à la librairie le Monte-en-l'air pour le lancement d'Ambiance garantie de Xavier Briend. Vous aurez l'occasion de les découvrir. Si possible avant la montée des océans, la hausse des températures, le retour d'Orphée des enfers pétrochimiques, l'avènement de la Malaïgue en Méditerranée, le déferlement de la peste écarlate, ou l'apothéose (sanguine) d'Al Teatro. Si tout cela se produit néanmoins, il n'est pas impossible qu'une poésie de la post-humanité émerge. Nul besoin, pour cela, d'attendre que la catastrophe survienne : il nous suffira d'explorer le Paysage augmenté de Mathilde Roux et Virginie Gautier, enfin disponible.
D'ici-là, quel que soit ce là, portez-vous bien,
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