Lettre d'info de mars 2022 9 mars 2022 – Publié dans : La lettre d'info – Mots-clés :

Jérémie Szpirglas
Anthropocène

 

Tout est dystopique de nos jours : il suffit d'ouvrir les yeux sur le monde qui nous entoure. Il y a pourtant matière à creuser des sillons de fictions plus heureux, sans nécessairement occulter la réalité, ni verser dans l'utopie pure (on sait bien d'ailleurs combien les utopies d'hier peuvent passer pour des dystopies à présent). D'autres fictions sont possibles, plus chaleureuses, drôles qui sait. La période peut-être ne s'y prête pas. C'est pourtant l'énergie qui se dégage du roman de Jérémie Szpirglas qui paraît aujourd'hui : Anthropocène.

Anthropocène n'est pas une dystopie mais une anticipation douce. Partant d'un élément architectural oublié dans le paysage (vestige d'un pont inachevé), un hapax, Jérémie Szpirglas se fait le conteur d'un genre d'odyssée doublement décalée : dans ce roman à deux faces, on explore à la fois notre présent pour évoquer le contexte de création et d'abandon de ce monument fantôme, et notre lointain futur pour en imaginer la perception à des siècles de distance. La vérité, si elle existe, se trouve sans doute à mi-distance. Mais les situations loufoques, les quiproquos, les affaires louches, les hypothèses invraisemblables, les vrais moments de poésie, elles, eux, sont partout dans le livre.

De quoi mettre un peu de douceur dans notre rapport (tendu) à l'avenir. Et pour de la douceur hors des livres, rendez-vous avec Philippe De Jonckheere, Michele Rabbia et Sébastien Rongier à la Maison de la poésie Paris le 1er avril prochain (voir ci-dessous).

D'ici-là, libre à vous de lire Anthropocène, et de l'aimer.



On s’amuse beaucoup, tant des hypothèses savantes d’archéologues fictifs que de la valorisation saugrenue d'un vestige industriel d'aujourd'hui. Un texte léger, spirituel, qui réjouit.

Les Notes

Totem ou bitte d’amarrage ? Autel ou défi lancé au divin ? Clocher ou mausolée ? Nécropole ou bunker ? Cadran solaire ou monument aux morts ? Outil d’étude astronomique ou arme de guerre ? L’hapax qu’est cet édifice perdu au milieu de nulle part et personnage principal de ce roman a une histoire. Et cette histoire se diffracte en combien de fictions tantôt graves, tantôts douces, souvent drôles, qui disent autant les errances passées de notre espèce humaine que ses péripéties futures. En les articulant toutes sur le ton amical de la conversation, en jouant avec les mystères d’une ruine à la fois banale et extraordinaire, Jérémie Szpirglas fait plus que nous conter la naissance et la postérité d’un pont : il affabule, au sens le plus noble du terme.

Un extrait

Perdu au fin fond de la forêt vierge, à mille milles de toute terre habitée, l’artefact — que dis-je ? l’hapax — dont il est question ici a longtemps été caché à nos regards par une végétation, touffue à l’extrême, et d’un développement vertical exceptionnel. Jusqu’à sa découverte en l’an de grâce 1859 Après Révélation, au hasard d’une expédition menée par les fameuses chronobiologistes quimpancaises Jiro Hirubota et Voloira Moiloiroimoinoi. Hirubota et Moiloiroimoinoi, qui seront du reste récompensées quelques années plus tard du prestigieux Prix Hibal, justement pour leurs travaux sur la biodiversité réalisés dans cette antique forêt secondaire.

Un seul coup d’œil sur ce monument hors du commun a suffi à ces deux éminentes scientifiques, et leurs guides-accompagnateurs, pour comprendre l’inestimable importance de leur découverte, ainsi que le pouvoir fabuleux et hypnotisant qu’il exerce depuis sur l’esprit humain, sans parler de son aura énigmatique, qui soulève
bien plus de questions qu’il n’apporte de réponses sur la civilisation qui l’a érigé, comme nous l’allons voir.

RDV à la Maison de la poésie avec
Philippe De Jonckheere, Michele Rabbia
& Sébastien Rongier

 

De livres en livres, Philippe de Jonckheere trace les contours fragiles d’une mémoire entre musique, informatique, littérature, vie familiale, photographie ou cinéma. Dans son dernier livre Je ne me souviens plus, l’auteur reformule un jeu avec la mémoire : de quoi se souvient-on quand on ne se souvient pas ? Entre ludisme littéraire et blessures secrètes, Philippe de Jonckheere laisse percevoir un portrait intime aussi drôle qu’émouvant.

Il lira ce soir  des extraits, accompagné par le percussionniste Michele Rabbia qui prolonge numériquement en direct les sons foisonnants de son instrumentarium bigaré et divers. Une avalanche d’images sera projetée pour mieux emmener le public au pays des souvenirs incertains.

La lecture musicale sera précédée d’un échange avec Sébastien Rongier autour de ces fragments d’une mémoire que sont Je ne me souviens plus.

Et revivez la rencontre de janvier
avec Fred Griot, Dani Bouillard & Benoît Vincent



Nos nouveautés d'hi(v)er





À paraître en avril



Revue de presse

Le livre de Christine Jeanney
est un livre d’art et d’essai.
La Nuit de Rachel Cooper lu et présenté par Pierre Ménard

Scandé par le « Je ne me souviens plus », le texte balance entre le léger et le profond, selon un rythme agréable à lire. Un exercice de style pour interroger la mémoire.

Philippe De Jonckheere lu par les Notes

Dans et par le poème, l’ironie, parfois acid(e)ulée, Katia Bouchoueva trace les contours d’une certaine « douce France » à l’idéologie rance ; avec des pointes de féminisme et d’antispécisme.

Germain Tramier, Littéralutte

L’écriture de Sébastien Ménard suit les mouvements, celui des arbres, de la pluie, de la vie. Revient parfois à un état animal, à nos origines.

Cécile Guivarch, Terre à ciel

Sous le signe du réchauffement climatique et de l’avidité capitaliste presque intacte, une impressionnante épopée poétique de la convergence des luttes.

Climats lu par Hugues Robert, Librairie Charybde