Carnet de bord 2021, semaine 12 28 mars 2021 – Publié dans : Carnet de bord – Mots-clés : , , , , , ,

publie.net, le feuilleton (que le monde du livre nous envie) à retrouver chaque semaine, par GV.

lundi

J'en suis à six sept huit prototypes différents pour la quatrième de La porte de la chapelle. J'ai même fait une version Télé Star, du genre Lors d'une session extraordinaire, les membres d'une organisation secrète pressent l'un des leurs de mettre la main sur une mystérieuse horloge et les deux moitiés d'une pierre triangulaire dotée d'étranges pouvoirs. La réunion de ces éléments, le jour où les planètes sont parfaitement alignées, doit en effet permettre à leur propriétaire d'acquérir la maîtrise du temps et de l'espace. Ne riez pas, il s'agit d'un vrai film (rien à voir avec La porte de la chapelle, évidemment). Aucune de ces versions ne me satisfait. J'ai l'impression de réécrire chaque fois la même quatrième, quel que soit le livre. Ça ne va pas. J'aimerais faire quelque chose de très simple, d'épuré, mais le tout sans réduire. C'est difficile à envisager. En fait, je n'ai pas les moyens techniques de mes ambitions : idéalement, la quatrième de couverture ne serait qu'une simple phrase, un pitch peut-être mais augmentable, plus grand à l'intérieur, et alors en cliquant sur des mots on pourrait l'étendre pour rendre au livre sa pluralité, sa profondeur, sa complexité. Possible de proposer ce type d'artefact sur un site, le nôtre, sans doute pas sur les plateforme de ventes, et moins encore sur le verso d'un livre imprimé. Que faire alors ? Refaire, jusqu'à ce que ça fonctionne.

mardi

Point tel avec Julie, dont un certain pourcentage est parasité (et comment faire autrement) par les différentes évolutions et stagnations de LA SITUATION ACTUELLE. Ce qui nous inquiète, c'est moins les dérives en cours actuellement dans le monde du livre (et sur lesquelles on ne reviendra pas, ce carnet s'en est fait le reflet depuis quelque temps) que la pérennisation de ce qui relève pour l'heure de mesures d'exception. En somme, que se passera-t-il lorsque la page du virus sera enfin tournée et que nous chercherons à retrouver une vie conforme à ce qu'elle était avant 2020, mais que les habitudes de tous les acteurs de la chaîne, et des consommateurs eux-mêmes, seront tellement ancrées qu'ils ne pourront ou voudront plus en sortir ? Que ferons-nous si les pratiques d'achats en librairie tête-de-gondolisantes se poursuivent même au-delà du covid ? On voit déjà que dans d'autres sphères de la vie pressurisées, en l'occurrence l'université, devant la perspective de la réduction de coûts permanente, on se verrait bien poursuivre le travail à distance pour des questions économiques... Quelles autres mutations forcées suivront ? Parfois, on se dit que ça n'a pas beaucoup de sens (sauf que ça en a un, qui bien sûr concerne d'autres intérêts que les nôtres). Qu'on se rassure : il n'y a pas beaucoup de sens à trouver ailleurs non plus. L'édition est de plus en plus contorsionnée et tordue sur elle-même : le seul domaine du roman français attire maintenant tous les désirs, y compris ceux des maisons qui n'en proposaient pas dans leur ligne éditoriale (c'est une surprise sans être une surprise : il s'agit du seul domaine à pouvoir prétendre à une variété de prix). La plupart des structures maintenant se diversifient pour tâcher de limiter la casse. L'identité de chacun devient de plus en plus floue et au fond tout le monde cherche à faire les mêmes livres, les mêmes coups, sur les mêmes sujets et dans les mêmes domaines. Et tout le monde n'est pas à égalité, pour reprendre le titre du livre de Bellamy que nous ferons paraître dans quelques semaines et dont Roxane achève la couverture ces jours-ci :

mercredi

La quatrième de couverture de Perdre Claire demande elle aussi qu'on cogite, mais pas de la même façon que La porte de la chapelle. Je ne veux aucune parole extérieure sur ce livre, donc pas de présentation. Un extrait simple, épuré. Trois propositions sont faites à Roxane, Christine et Arnaud et il y a consensus. Nous allons donc pouvoir la soumettre à l'autrice. La quatrième de L'était une fois dans l'ouest (dont par ailleurs nous relisons la première version dans sa maquette papier), enfin, sera sans doute plus conventionnelle dans sa conception : il y a un décor à planter, jouer avec des ombres et des lumières. Qui sait recourir à Kafka. Ça progresse. Les couvertures, elles, se déplient, voire se déploient, et s'apprêtent à trouver leur forme. Tout se met en place.

jeudi

Journée d'échanges autour de la poésie, du numérique, des nouvelles possibilités d'édition, des pratiques divergentes pour mettre en valeur les écritures contemporaines. C'est organisé par le Mac Val à Vitry-sur-Seine où nous aurions dû être aujourd'hui, mais enfin comme pour tout la situation sanitaire est passée par là. Nous sommes donc des têtes voire qui sait des bustes flottant dans des écrans et nous débattons de tout cela : nous ne sommes certes pas en présence mais nous présentons néanmoins nos mondes, nos pratiques, notre vision des choses. C'est chapeauté par Pierre Ménard et jalonné de lectures et/ou performances poétiques (Nicolas Tardy, Marin Fouqué, Laura Vazquez, Christophe Manon). L'ensemble de la journée est d'ailleurs à retrouver en vidéo, par exemple ici et la rencontre à laquelle j'ai participé est à revoir ci-dessous. En sortant de cette table ronde (c'est-à-dire donc en ne sortant pas mais en restant précisément là où je me trouvais déjà), je dis à Roxane que comme d'hab après une table ronde, j'ai l'impression d'avoir raconté absolument n'importe quoi (on m'affirme par ailleurs que non et je choisirai de le croire).

vendredi

Il est arrivé, le disque de Climats. Beau, coloré, rutilant même, c'est un objet très sympa qui paraîtra en mai en même temps que la nouvelle édition du livre, dont nous devrions également recevoir les exemplaires presse sous peu. Tout avance progressivement. Le Journal du Brise-lames, quant  à lui, continue de se métamorphoser, ici un nouveau vidéopoème réalisé par Stéphane Gantelet et Juliette Mézenc :

Phare rouge (le Journal du Brise-lames) from publie.net on Vimeo.