Carnet de bord 2021, semaine 17 2 mai 2021 – Publié dans : Carnet de bord – Mots-clés : , , , , ,

publie.net, le feuilleton (que le monde du livre nous envie) à retrouver chaque semaine, par GV.

lundi

J'ai beau avoir passé X semaines sur les tableaux contenant les informations de chacun de nos livres et autrices-auteurs concernés par les relevés, ça ne m'est pas venu à l'esprit de mettre à jour ma propre adresse postale qui a changé depuis l'an dernier, et c'est Manon qui me l'indique dans son message (preuve que nous arrivons au bout des envois, figurant moi parmi les dernières lettres de l'alphabet). Mais ce n'est pas la seule incongruité de communication ce jour : dans notre outil interne de gestion de projets (appelé comme chacun sait maintenant cabine de téléphone rouge), on se parle les uns avec les autres en se taguant mutuellement. On se tague comme sur un réseau social X ou Y pour pouvoir déclencher chez l'autre l'émission d'une notification. Jusque-là tout va bien. Mais ces tags induisent dans nos échanges un air formel un peu étrange, puisqu'il s'agit de conversations décontractées mais ponctuées de prénom d'état civil à tout bout de champ, alors le moindre dialogue prend des airs de débat d'entre-deux tours du genre Pourras-tu quand tu auras un moment GUILLAUME VISSAC... ou C'est une très bonne remarque ROXANE LECOMTE. (Et ainsi de suite.)

mardi

Encore une histoire de métadonnées. Oublions les livres un moment, mettons un pied dans l'univers du disque. En l'occurrence, le disque de Climats, qu'il convient d'intégrer aussi aux plateformes en ligne pour tâcher de rayonner au-delà de notre seul site web (hors points de vente physique, bien entendu). Déjà, je constate avoir commis une erreur de nommage des fichiers il y a quelques jours en générant justement leurs métadonnées. Car là, horreur, tout est mélangé : les Mundurukus sont devenus faisons des haies arboréesKatrina est le charbon, etc. Seul Crétacé est resté Crétacé. Il faut donc tout reprendre (sauf le Crétacé), tout réécouter (le début du moins) pour identifier les pistes et ensuite tout renommer. Revérifier compulsivement aussi des fois qu'on aurait encore fait n'importe quoi (non). Ensuite, passer à Bandcamp et compagnie. Le gros morceau correspond à la centrale qui nous redispatchera vers toutes les plateformes de streaming et de ventes numériques, Spotify, Apple Music et j'en passe. Là, c'est un brin rébarbatif car la machine nécessite que l'on entre pour chaque piste une série d'informations qui au final sont communes au disque entier : et est-ce une reprise ou une chanson originale, et qui sont les auteurs, et s'agit-il d'un live, et dans quelle langue est-ce, et est-ce que les paroles proposent un contenu explicite ? Malheureusement, manque la case les paroles font état d'un contenu manifestement explicite, mais pas au sens où vous l'entendez. Ensuite, il faut déposer les pistes elles-mêmes et alors il faut que ce soit du FLAC ou du WAV et pas de l'AIF, il faut que ce soit à 44.1kHz et non 48, et surtout surtout il faut que ce soit uploadé un fichier après l'autre et pas en même temps sinon ça fait cafouiller le truc (grmpf). Découvrons plutôt un extrait dudit disque, c'est plus sain :

 

mercredi

Ça, c'est Fred Griot. Je veux dire le nouveau livre de Fred Griot. Enfin tu regardes l'herbe. C'est beau. C'est la V3, avant le dépôt chez l'imprimeur pour en tirer des épreuves. C'est relu, là. Ça se passe de commentaire, je crois.

jeudi

Suite et fin des relectures du Marguerite Audoux, dont la couverture est à présent posée, que voici (suivi d'un court extrait tiré de L'Atelier de Marie-Claire) :

Quelques unes ne se gênaient pas pour se moquer de l’accent du patron.
Comme il prononçait crante au lieu de quarante, on confondait souvent avec trente, et cela causait des erreurs dans les mesures.
Aussi, on entendait tout à coup une voix hardie :
— Patron, combien faut-il de centimètres à l’encolure du vêtement bleu ?
— Crante… répondait le patron.
Et la voie hardie reprenait :
— Ça prend-il un 3 ou un 4, votre chiffre ?
Il n’osait pas se fâcher, mais il disait à sa femme :
— Elles sont un peu trop libres.

vendredi

Réunion (au sommet) en visio pour l'Esquif pour un nouveau projet confidentiel hush hush et tout non non je ne dirais rien... Et puis voilà que nous retombons dans le vortex des colis improbables : en départ mercredi mais toujours sur le centre de tri depuis cette date, n'y aurait-il pas comme un hic ? Non, à en croire la Poste (ou plutôt le centre d'appels externalisés à l'étranger à qui ils sous-traitent leur service clients), tout va bien, le colis sera livré sous les meilleurs délais. Genre quand ? Sous les meilleurs délais. Mais je serai prévenu par mail quand il se passera quelque chose ou il faut que je continue à actualiser le suivi ? Vous serez prévenu par courrier sous 21 jours. Nous voilà rassurés. Aussi rassurés au moins que les personnages de L'était une fois dans l'ouest, roman fou de Thibault de Vivies à paraître à l'automne prochain et donc voici déjà le visuel, et la quatrième ;

Entre la Cité soumise aux radiations et la forêt voisine se trouve une petite maison isolée, en lisière de la civilisation. Un couple y habite. Leurs enfants sont loin désormais, sûrement perdus dans des dunes de sable, la violence alentour est tenue coûte que coûte hors des murs quand bien même le monde extérieur et l’hiver hostile se pressent à leur porte. Mais peut-on se tenir toute une vie à l’abri des intrusions barbares ?
Ce roman déviant a la vitalité du théâtre de rue et l’ampleur des fictions fragmentaires retrouvées dans les carnets de Kafka. Telle pourrait en être la matrice : C’était un après- midi de dimanche. Ils étaient au lit dans les bras l’un de l’autre. C’était l’hiver, la pièce n’était pas chauffée ; ils étaient étendus sous un lourd édredon de plumes.
Alternant le point de vue de la femme et de l’homme portant sur leur environnement et leur intimité un regard tendre et tendu, projetant autant leurs illusions que leurs fantasmes, Thibault de Vivies retourne le roman dedans-dehors pour en dévoiler l’inquiétante alchimie.
Fiction, diction et poésie la fois : cet inattendu mélange, c’est un peu Adam et Ève entre les feux du western crépusculaire et le décor étrange des contes de fées.