Mais qui lira le dernier poème ? ou le désarroi contemporain 24 décembre 2013 – Publié dans : La revue de presse, Notre actualité – Mots-clés : , , , , ,

Merci à Étienne Ruhaud pour cette lecture de Mais qui lira le dernier poème ? d’Éric Dubois. Une chronique à retrouver ici.

dubois_mais-qui-liraBlogueur, homme de radio, fondateur et animateur de la revue en ligne Le Capital des mots, Eric Dubois semble opposé à toute forme d’hermétisme, tant dans ses choix de publication que dans sa propre production littéraire. Déployant une langue à la fois sobre et néanmoins souple, harmonieuse, Mais qui lira le dernier poème ? évoque la vie quotidienne, au risque d’un certain prosaïsme, parfois, une sorte de simplicité volontaire, ascèse stylistique, qui n’est pas sans rappeler, par moments, Bukowski ou Houellebecq : Le temps s’étire comme un chewing-gum/La bite perdue dans les poils et les plis/du pantalon/Dans la poussière/et les temps morts. Éditeur du recueil sous forme numérique [et papier, ndlr], François Bon parle lui d’écriture concrète. Poésie de l’actuel, de l’immédiat, les vers brefs et précis d’Eric Dubois évoquent la cité d’aujourd’hui, son décor froid, inamical mais familier : Encore l’œil électronique/de désirs fantasmés/Par l’unité centrale/La caméra et l’écran/dans la nuit du commerce. Visuels, matérialistes, les textes ne constituent pas pour autant une sorte de contemplation plate et détachée, une forme d’objectivisme un peu formel. Chaque phrase semble en effet habitée par la mélancolie, pour ne pas dire le désespoir. Quelle valeur accorder à la poésie, au sein d’une société désincarnée ? Angoissé par la perte de sens, la vacuité intérieure, Eric Dubois s’interroge douloureusement :  Quel sera le dernier poème ?/L’unique correspondance ?/Quand écrirai-je le dernier poème ?/Qui le lira ?/Aurai-je la force de l’écrire ? Reste l’amour, apparu en filigrane comme pour sauver l’homme de sa propre déréliction, de son propre sentiment de néant : Il était une fois/elle/Je l’adore/ses cheveux/Et le temps/a continué à faire son chemin.

Riche en images, dépouillé mais fin, ce bref recueil trop méconnu, ouvre donc à une lecture à la fois originale et sincère de l’époque, du désarroi contemporain.

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